vendredi 29 octobre 2010

La fin du monde sous la pluie

Le mythique détroit de Magellan... "Estrecho de Magallanes", en espagnol. Très compliqué à prononcer, surtout en espagnol d´Argentine. Des "r", des "ch". Des sons rauques pour ce qui s´annonce comme la fin du monde. En imaginant l´endroit, on se voit face à deux océans déchaînés, que l´on surplombe du haut d´une falaise, sous un climat hostile, les cheveux au vent (comme le tableau représentant Châteaubriand contemplant les ruines de Rome, l´air grave...), contemplatif. On se sent si petit face à cette nature totalement sauvage. Un endroit moins dévastateur pour les marins que le cap Horn, mais qui, selon Les Mystérieuses Cités d´Or, ne s´en laisse pas pour autant imposer. Bref, un endroit plein de légendes. La fin du monde, ou presque.
Alors pour voir ce monstre légendaire, nous sommes allés à Punta Arenas, ville qui donne directement sur le détroit. La capitale de la région de la Magallanes est une ville où il fait (très très) souvent gris et où il pleut (très très) souvent. Mais ça tombe bien, on voulait voir le détroit sous un climat déchaîné. Alors si on était arrivés sous un soleil brésilien, notre fun aurait été gâché. Autant le dire tout de suite, nous avons vu le détroit... mais il est calme ! Calme au point où cela ressemble à un lac de montagne, sauf qu´il y a du courant dans l´eau (mais moins fort que celui du cap Horn, quand même), quelques vaguelettes et qu´on y trouve des pingouins ! Alors pour le côté tourmenté, c´est raté. Mais pour les cheveux au vent, ça, on a été servis ! Chapeaux et perruques doivent restés bien attachés ! Alors oui, on a eu une pointe de déception en voyant la mer d´huile de Punta Arenas, mais au moins, on aura vu l´endroit.
On a pu cotoyer des pingouins ! Le premier que nous avons rencontré avait dû se perdre car il était tout seul face au détroit, à Punta Arenas. On a su qu´il était là, car, autour de lui, quelques personnes étaient rassemblées. Et lui, gros, super beau, drôle (car par définition, un pingouin, ça a une drôle d´attitude...), il allait en venait dans l´eau, en ressortait, se lavait, nous approchait, se relavait, retournait dans l´eau, se rerelavait, etc. On aurait pu le regarder pendant des heures, qu´on ait été là ou pas ne semblait pas le perturber outre mesure. À croire qu´en plus d´être manchots, ils sont aveugles !
Ensuite, à quelques kilomètres de la ville, se trouve la réserve de Seno Otway Pinüinera, où des colonies de manchots vous tendent les ailes et se laissent photographier. Une grande colonie qui reste là, à se prélasser dans les vagues du détroit, à sortir en groupe, marchant en se brinlebalant de gauche à droite, souvent sur le point de tomber. Quand on les a vus, ils faisaient leur nid, car les oeufs sont sur le point d´éclore. Alors, dans la steppe brouissailleuse où ils vivent, on voyait des têtes apparaître (sans doute le propriétaire de la tête cherchait-il sa douce moitié), et parfois, on en voyait se mettre à crier (ça fait le même bruit que quand un âne hénit). Mais le spectacle valait le détour !
Oui, le détour... Car finalement, on en a fait un sacré. Après Punta Arenas, on souhaitait remonter le long de la côte Pacifique jusqu´á Puerto Montt et continuer vers le nord. Le problème, c´est que c´est impossible ! La région de la Magallanes est isolé du reste du pays. Pas de route pour aller plus au nord ! Juste des glaciers. Alors soit on prend un bateau pour contourner les glaciers (sans doute une superbe croisière, mais c´est très cher), soit on prend un bus et on repasse par où nous étions lors de nos deux dernières semaines de voyage, c´est-à-dire par l´Argentine. Ce que nous avons été obligés de faire. Punta Arenas-Puerto Montt en bus, c´est près de trente et quelques heures, deux estampes des douanes chiliennes et autant de leurs collègues argentins ! Autant dire qu´aller voir le détroit de Magellan et les pingouins de Seno Otway, ça se mérite... Alors pour nous, la fin du monde s´arrête à Punta Arenas. Pas de Puerto Williams (la ville la plus australe du continent), c´est trop de route pour voir un paysage sans doute similaire à celui que nous avons vu.
Une fois descendus du bus, à Puerto Montt, nous sommes partis à la recherche d´un hôtel dans une ville... "affreuse", "glauque", "lugubre", "déprimante" (à vous de choisir, toutes les réponses sont bonnes). Bref, nous savions que nous ne resterions pas dans cette ville. Fin du paragraphe sur Puerto Montt, il n´y a rien à dire de plus.
Histoire de se dépayser un peu, nous avons repris un bus pour l´île de Chiloé, à Ancud. Une grosse île de près de 250 km de longueur, très spéciale, où les gens vivent "autrement" (selon nos guides et notre logeuse de Puerto Montt), et qui a la réputation d´être très pluvieuse (pour le moment, disons que le Chili en général est très pluvieux). Nous sommes donc sortis du bus sous un ciel gris. Nous avons rejoint notre hôtel. Il s´appelle l´hospedaje Bellavista... Évitez-le, à moins d´aimer les films d´horreur tel que Psychose (même type d´accueil, même emplacement). Nous, on y est allés car notre guide nous le conseillait et vantait son desayuno typique de l´île. En réalité, la maison semble tomber en ruine, il y fait super froid et humide, ce n´est pas chauffé, le desayuno est payant, et surtout, la fille qui tient les lieux fait peur ! On n´a pas envie de "bitcher", mais bon, disons les choses comme elles sont. La dame n´a que deux dents (les incisives), deux espèces de crocs, au niveau inférieur de la mâchoire, et elle traîne en pantoufles et pyjama dans sa maison déserte ! Ça fait froid dans le dos (mais pas la peine de penser à elle pour avoir froid dans cette maison, le climat de l´île s´en occupe très bien). Surtout que le peu de fois où on l´a vue, elle était dans son lit, dans une chambre bordelique dont la porte qui donne sur le couloir central était toujours ouverte. Voilà...
À Ancud, comme c´est la saison basse, les agences de voyage sont toutes fermées. Comme d´autres magasins. Ce qui donne à la ville un côté un peu triste, surtout quand il fait gris et qu´il pleut (bref, 95% du temps). Nous avions prévu d´aller quelques jours sur l´île, voir une colonie de pingouins, aller voir Chepu et sa forêt submergée, puis Castro, la ville aux maisons sur pilotis. La météo nous en a dissuadés. Pluie, pluie et repluie. On connaît par coeur le mot pluie en espagnol, maintenant. "Lluvia". On a quand même eu le temps de visiter Ancud, son port et son mirador qui surplombe la ville et l´océan. On a eu de la chance, car tout le temps de notre visite de la ville, on a un peu vu le ciel bleu. Car sinon, les deux autres jours où nous nous y trouvions, il a plu comme vache qui pisse, tonné, délugé, tombé des trombes, aversé, bruiné. Bref, la lluvia sous toutes ses formes. Par contre, ici, c´est le paradis pour qui aime les fruits de mer. Ils sont à la portée de la main, frais, délicieux et les portions sont généreuses. Et nous nous régalons de ce qui semble être une spécialité chilienne : la purée de patates ! Super épaisse, onctueuse, crémeuse et servie en abondance pour accompagner le poisson, la viande ou même le boudin local.
Mais une belle surprise nous attendait, pour l´étape suivante... Puerto Varas et ses volcans environnants (et sa pluie, mais bon, il paraît que ça va passer).

2 commentaires:

lys a dit…

Si j'ai bien vu sur la photo, je dois faire 13200km pour serrer la patte aux manchots! Bon, ben j'arrive!!!!!

Bibi a dit…

Salut! Votre ami Bibi est de retour!!Il a plein de belles choses à vous dire, écoutez:
"Pauvre Gabriela! Pour toi, le vent était des pleurs et la terre de mes beaux souvenirs, une terre de nuit froide et le lieu au- delà duquel ne vont que les morts! Combien de douleurs portais-tu dans ton coeur?"
Grâce à vous, Bibi a découvert la poésie chilienne; Gabriela, c'est Gabriela Mistral.J'suis vraiment trop fort!!!!